Le respect des règles de conduite est essentiel pour limiter le nombre d’accidents. Et pourtant, le nombre d’infractions reste considérable. Le contentieux routier représente plusieurs millions d’infractions par an. Cette recherche, réalisée par l'Ifsttar (dorénavant faisant partie de l'Université Gustave Eiffel) en collaboration avec le Cerema, étudie les facteurs qui influencent le rapport à la règle ou sa violation. Pour ce faire, une enquête a été réalisée auprès de plus 1000 participants représentatifs des conducteurs français.
La plupart des personnes interrogées mettent en cause la légitimité de certaines règles et ont tendance à les considérer comme conditionnelles. Ce relativisme peut expliquer pour partie la réalisation d’infractions par les conducteurs. En effet, ils ont tendance à substituer aux règles de conduite officielles des normes informelles en fonction du contexte de conduite, et le strict respect des règles de sécurité est souvent remplacé par une approche conditionnelle : pour les français, les règles du code de la route seraient ainsi contournables dans certaines situations. Également, le phénomène d’optimisme comparatif joue un rôle de ce rapport aux règles. En effet, les conducteurs s’estiment plutôt bons : 80 % d’entre eux considèrent être de meilleurs conducteurs que la moyenne. Cela entraîne une confiance excessive et une moindre nécessité subjective de respect de la règle.
Acceptabilité des règles
Il a été constaté que les femmes et les conducteurs âgés déclaraient une plus grande conformité à la loi. Néanmoins, les effets de l’âge et du genre sur le respect des règles restent de faible ampleur.
La proportion de conducteurs qui considèrent les radars comme efficaces est de 53 %, ce qui constitue une baisse importante en comparaison d’évaluations précédentes. Les diverses dimensions de l’acceptabilité (efficacité, équité, atteinte à la vie privée, etc.) ont subi la même évolution défavorable et restent des dimensions cruciales pour le respect des règles et leurs modalités de contrôle. Ceci démontre une usure des mesures et la nécessité d’un renouvellement permanent des actions en faveur de la sécurité routière et des mesures pédagogiques de soutien.
Les valeurs personnelles
Les conducteurs français ont tendance à substituer aux règles officielles de conduite des normes informelles qui dépendent du contexte de conduite. Il existe un lien fort entre le contrôle perçu et l'intention de se conformer, ce qui indique que certains conducteurs estiment que le respect rigoureux et systématique des règles échappe à leur contrôle, en raison par exemple de leur trop grande complexité. Deux autres facteurs se sont révélés liés à l'intention de se conformer : voir les règles comme conditionnelles joue négativement alors que le conformisme joue positivement, révélant ainsi certains processus de motivation impliqués dans le respect des règles. La dimension discourtoisie est corrélée à l’infraction alcool au volant, ce qui indique que celle-ci est souvent associée à un certain mépris pour les autres usagers. Enfin, les dimensions rejet de l’autorité et libertarianisme routier sont corrélées avec une attitude négative envers les contrôles routiers, ce qui souligne l’importance des valeurs personnelles dans le rapport aux contrôles.
Recommandations
Les politiques publiques doivent tenir compte du scepticisme des conducteurs quant à la légitimité des règles de sécurité routière. Il est notamment recommandé de modifier les stratégies de communication lors de la mise en œuvre de nouvelles mesures et un renforcement des contrôles des règles tout en s’assurant de leur légitimité et leur effectivité.
Des leviers d’actions demeurent sur les dimensions de l’optimisme comparatif, des valeurs culturelles, l’influence par les pairs, la conditionnalité perçue des règles, la confiance dans les services de l’État, l’usure des mesures, et le sentiment d’efficacité. Diverses stratégies comme le marketing des normes sociales ou les nudges pourraient y être introduites.
Le rapport d'étude complet est disponible en téléchargement ci-contre, ainsi qu'une fiche étude d'une page, présente dans le bilan 2019 de la sécurité routière.