De l’après guerre à nos jours, environ 700 000 personnes ont été tuées sur les routes de France. L’amélioration de la sécurité routière sur le long terme résulte de politiques coordonnées aux plans local, national et international pour assurer la sécurité des déplacements, de l’organisation de l’urbanisation aux solutions de mobilité collective ou individuelle. La sécurité des mobilités routières repose conjointement sur l’infrastructure (conception, entretien, exploitation), le véhicule (sécurités passive et active) et le comportement des usagers (éducation, prévention, répression). La prise en charge des blessés et les progrès médicaux complètent le dispositif.
De l’après-guerre à 1972
L’accidentalité explose après-guerre avec l’expansion du parc automobile. L’ensemble des règles de circulation est précisé en 1954 ; le recueil de données accidents, fiabilisé, comptabilise 7 166 personnes tuées à 3 jours (décédées sur le coup ou dans les 3 jours suivant l’accident). L’investissement sur les routes nationales (RN) permet des déplacements plus rapides et plus sûrs : la moitié des autoroutes sont construites entre 1946 et 1975, le traitement des points noirs sur RN débute dans les années 1960 ; en 1962 la vitesse maximale autorisée (VMA) est de 60 km/h en ville et en fin de décennie sont expérimentées des VMA sur RN les week-ends de grands départs. Des seuils d’alcoolémie sont instaurés (contravention 0,8 g/L, délit 1,2 g/L d’alcool dans le sang). Sur 1952-1972, la mortalité est multipliée par 2,5 et le trafic par 7,5 : le nombre de personnes tuées par milliard de véh.km parcourus passe de 230 à 77.
De 1972 à 2002
La politique de sécurité routière s’organise : création du comité interministériel de la sécurité routière, nomination d’un délégué interministériel. En 1972, le pic de mortalité est atteint: 16 545 morts comptabilisés à 6 jours (soit 18 000 morts à 30 jours), une situation que dénoncent les 16 000 habitants de Mazamet allongés sur le sol. Cette prise de conscience collective permet l’instauration de VMA hors des villes, le port de la ceinture de sécurité à l’avant (en 1991 à l’arrière) et progressivement le casque pour les 2RM. La politique locale de sécurité routière se structure (plans départementaux de sécurité routière) ; le programme REAGIR1 naît après l’accident de Beaune en 1982 (53 morts dont 44 enfants). Les véhicules sont plus sûrs (anti-blocage des roues puis airbag, contrôle technique en 1985). En 1989, le livre blanc de la sécurité routière2 trace les grandes orientations et exprime la nécessité d’améliorer le contrôle. Le permis à points est instauré en 1992. La mortalité baisse de - 27 % sur 1972-1982 (trafic multiplié par 1,4), de - 24 % sur 1982-1992 (trafic multiplié par 1,3), et de - 22 % sur 1992-2002 (trafic multiplié par 1,2). En 2002, on a 14 tués par milliard de véh.km parcourus.
De 2002 à 2023
Le Conseil national de la sécurité routière (CNSR) est créé en 2001 . En juillet 2002, la sécurité routière est l’un des quatre chantiers prioritaires du Président de la République. Les premiers radars fixes de contrôle automatisé de vitesse sont installés. Le permis probatoire est instauré en 2004. La conduite avec alcool entraîne un retrait de 6 points. On compte moins de 5 000 morts en 2006 et une réduction de - 51 % de la mortalité sur 2000-2010. Plus de 30 000 vies ont été épargnées durant cette période, dont les trois quarts grâce à la baisse des vitesses pratiquées et 11 % grâce à l’amélioration de la sécurité du parc automobile . L’objectif d’une baisse de 50% des décès ayant été atteint sur 2000-2010, l’Union européenne reprend ce même objectif pour la période 2010-2020. Mais la mortalité routière en France, à l’instar de celle des autres pays européens, marque le pas après 2013. Grâce à de nouvelles mesures telles l’engagement des employeurs dans la prévention, la diversification des radars, le renforcement de l’apprentissage de la conduite, l’abaissement de la VMA à 80 km/h, la tendance s’infléchit en fin de décennie. Les restrictions de circulation en 2020 et 2021 lors de la pandémie réduisent ponctuellement le bilan des décès routiers (résultat 2020 équivalent à celui de 1925 pour un parc véhicule multiplié par 50). L’année 2023 est en baisse de - 2,4 % par rapport à 2019. La mortalité a baissé de - 53 % sur 2002-2012 (trafic multiplié par 1,1), et de - 11 % sur 2012-2019 dans un contexte de stabilité du trafic routier. Le nombre de personnes tuées par milliard de véh.km parcourus passe de 14 en 2002 à 5 en 2023.
Perspectives pour 2030, vision 2050
La France a signé les déclarations européennes de La Valette en 2017 et de Stockholm en 2020. Ainsi, elle s’est engagée à long terme dans la « vision zéro » (zéro décès et zéro blessé grave à l'horizon 2050) et a repris à son compte l’objectif en sécurité routière de l’ONU de réduire de moitié la mortalité routière et le nombre de blessés graves pour la décennie d’action en cours (d’ici 2030, en prenant comme année référence 2019, avant la pandémie). Post-pandémie, si le bilan 2023 est proche de celui de 2019, la structure de la mortalité a changé avec le développement des modes doux, le télétravail. Par ailleurs, l’Europe inscrit l’évolution des mobilités dans une stratégie de décarbonation « Fit for 55 » (réduction des émissions de CO2 de - 55 % entre 1990 et 2030). En France , 30 % des émissions de CO2 sont générées par les transports. Pour les dé-placements individuels, la voiture contribue à 78 % des émissions et l’avion 19 %. Les leviers d’action relèvent de la sobriété (réduction des déplacements plutôt qu’augmentation, report modal, covoiturage) et des progrès technologiques (des véhicules propres et une énergie produite bas-carbone). La structure du parc véhicule va évoluer (plus de véhicules électriques, des véhicules moins gros), et les habitudes de mobilité vont être trans-formées à moyen terme.